30 septembre 2025

La tarification au kilomètre : vers un modèle plus juste pour les transports publics

La tarification au kilomètre : vers un modèle plus juste pour les transports publics

Réinventer l’équité tarifaire

Les transports publics doivent être simples à comprendre et faciles à utiliser. Un élément essentiel de cette simplicité est la perception d’un tarif clair et équitable. Or, dans de nombreuses régions, les structures tarifaires reposent encore sur des systèmes zonaux conçus il y a plusieurs décennies : des modèles hérités du passé, de moins en moins en phase avec les attentes des voyageur·euse·s et avec les objectifs de transformation numérique.

Au fil du temps, ces systèmes zonaux se sont complexifiés : exceptions, offres spéciales et nouveaux types de titres de transport se sont multipliés. Résultat : des centaines de produits différents qui suscitent souvent la confusion, en particulier chez les voyageur·euse·s occasionnel·le·s ou celles et ceux qui se déplacent dans une région inconnue.

Pour de nombreuses autorités organisatrices et exploitant·e·s, la question n’est donc plus de savoir s’il faut moderniser la structure tarifaire, mais comment.

La tarification au kilomètre ouvre une voie prometteuse : elle réduit la complexité, renforce l’équité et crée de nouvelles opportunités pour augmenter la fréquentation, favoriser l’adoption numérique et optimiser les recettes, tout en mettant l’expérience des voyageur·euse·s au premier plan.

Les limites des systèmes zonaux

Les systèmes de zones ont pu avoir du sens à une époque, mais aujourd’hui ils posent de nombreux problèmes. Les voyageur·euse·s se retrouvent souvent déconcerté·e·s par les frontières tarifaires, en particulier celles et ceux qui voyagent rarement ou qui effectuent de courts trajets franchissant par hasard une limite de zone. Dans bien des cas, ces trajets sont facturés de manière disproportionnée, ce qui suscite frustration et sentiment d’injustice.

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Même distance, tarifs différents : les frontières de zones ne reflètent pas les réalités de la mobilité.

Modifier une structure zonale — qu’il s’agisse de la simplifier, de fusionner des zones ou de les supprimer — reste en outre une démarche politiquement sensible et administrativement lourde. De tels ajustements tarifaires nécessitent souvent des années de négociation et de mise en œuvre.

Parallèlement, les attentes des usager·ère·s évoluent : ils et elles réclament des solutions numériques, plus de simplicité et davantage de transparence. Les voyageur·euse·s veulent des prix compréhensibles et comparables d’un coup d’œil, sans avoir à faire de calculs complexes. Les plans de zones et les tableaux imprimés paraissent de plus en plus dépassés à l’ère digitale.

Une tarification plus simple et plus transparente

La tarification au kilomètre constitue une alternative claire : le prix dépend de la distance réellement parcourue et non des zones traversées. Dans de nombreuses régions, ce modèle est rendu possible grâce à la technologie Mobile Pay-as-you-go (MPAYG). On parle aussi parfois de « tarif électronique » ou de « tarif à vol d’oiseau ».

Le principe de base est facile à comprendre :

Tarif de base + (distance en km * prix au km)
Des plafonds tarifaires peuvent être ajoutés, par trajet, par jour, par semaine ou par mois, afin de garantir prévisibilité et accessibilité pour les voyageur·euse·s.

Cette approche supprime les hausses de prix aux frontières artificielles et rapproche le paiement de la valeur réelle du trajet parcouru.

Mesurer la distance, deux approches possibles

Lors de la mise en place d’un modèle de tarification au kilomètre, deux méthodes principales de calcul de la distance sont généralement envisagées. Elles poursuivent toutes deux le même objectif : garantir une tarification transparente et équitable. Mais elles diffèrent par la façon de mesurer les trajets et par les implications techniques qui en découlent.

Origin–Destination: Quand le prix dépend du trajet réel

Dans ce modèle, le tarif est calculé en fonction de l’itinéraire effectivement parcouru. Grâce au suivi de localisation, par exemple via GPS, le système prend en compte les correspondances, les détours et les différents modes de transport utilisés au cours du trajet.

Exemple 1 : Une courte course… mais coûteuse

Une touriste prend le tram pour un seul arrêt et franchit sans le savoir une limite de zone. Le prix zonal est alors de 3,90 €, alors que le trajet n’a duré que quelques minutes. 

Avec un modèle de tarification au kilomètre, elle aurait pu traverser toute la ville (une distance quatre fois plus longue) pour seulement 2,10 €.

Vergleich systeme FRLa tarification au kilomètre rend les courts trajets abordables

Exemple 2 : Le détour pittoresque

Un·e voyageur·euse monte dans un bus en vallée pour rejoindre la ville voisine. Les deux communes ne sont distantes que de 5 km à vol d’oiseau, mais l’itinéraire routier sinueux s’étend sur 10 km. Dans un modèle Origin–Destination, le tarif est calculé sur la base des 10 km, même si la distance directe est bien plus courte. Pour préserver l’équité, il est possible d’introduire des plafonds tarifaires par trajet ou par jour afin de limiter le montant maximum payé.

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Les plafonds tarifaires garantissent l’équité pour les voyageur·euse·s

Ce modèle offre une grande précision, reflète le service réellement fourni et peut être facilement compris lorsque les schémas de mobilité sont connus. En revanche, pour les courts trajets empruntant des itinéraires plus longs, il peut entraîner des tarifs jugés injustes. Une communication claire et l’application de plafonds tarifaires sont alors essentielles pour maintenir la confiance et l’adhésion.

Le tarif à vol d’oiseau : une simplicité maximale

Le modèle « à vol d’oiseau » — ou Beeline — calcule la distance la plus courte entre le point de départ et la destination, sans tenir compte de l’itinéraire réellement emprunté. Il est transparent et facile à expliquer aux voyageur·euse·s.

Exemple :

Reprenons l’itinéraire pittoresque : deux arrêts se trouvent à 5 km à vol d’oiseau, mais la ligne de bus sinueuse en parcourt 10. Le prix est alors calculé sur la base des 5 km, selon la formule simple :

Tarif de base + (distance en km * prix au km). 

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Cette approche est facile à communiquer, rapide à mettre en place et beaucoup plus flexible que les systèmes zonaux, notamment dans les réseaux multi-opérateurs ou régionaux. Elle résiste aussi mieux aux évolutions du réseau, par exemple l’ajout de nouveaux points de correspondance. 

Les autorités organisatrices peuvent en outre définir des plafonds tarifaires par trajet ou par période (jour, semaine, mois) afin de garantir l’équité pour l’ensemble des voyageur·euse·s. 

Choisir le modèle le plus adapté

Il n’existe pas de solution unique. L’essentiel est que la logique tarifaire soit perçue comme équitable, compréhensible et cohérente.

Dans certains cas, une approche hybride peut constituer le meilleur compromis. Ainsi, la ville d’Aschaffenburg (Allemagne) applique deux tarifs en parallèle : un tarif zonal forfaitaire à l’intérieur de la ville et un tarif à vol d’oiseau dans la région. Lorsque les deux s’appliquent, c’est automatiquement le tarif le plus bas qui est facturé, garantissant à la fois équité et simplicité (voir l’étude de cas).

Quelle que soit la méthode retenue, les deux modèles de tarification au kilomètre traduisent une évolution plus large vers des systèmes centrés sur les usager·ère·s et appuyés par le numérique. Ici, la technologie devient un levier, et non un obstacle.

Réussir la transition

L’un des principaux défis du passage d’un système zonal à un modèle au kilomètre réside dans la gestion de la transition. Faire coexister trop longtemps l’ancien et le nouveau système peut sembler pragmatique, mais cela génère une complexité supplémentaire, tant pour les voyageur·euse·s que pour les opérateur·rice·s.

Une approche plus durable consiste à réduire progressivement les anciens produits et à orienter les hausses tarifaires de manière à favoriser le nouveau modèle. Cette démarche permet de renforcer l’acceptation tout en laissant le temps d’affiner le système.

La tarification au kilomètre, par nature flexible, se prête à une mise en œuvre progressive. Avec les bons outils numériques, les exploitant·e·s peuvent tester et ajuster localement avant de généraliser.

 

Aller de l’avant : la tarification au kilomètre comme levier stratégique

La tarification au kilomètre n’est pas seulement une méthode de calcul. Elle constitue un véritable levier stratégique qui permet aux opérateur·rice·s de :

  • Simplifier des structures tarifaires devenues obsolètes
  • Accroître la transparence et renforcer la confiance des voyageur·euse·s
  • Encourager l’adoption numérique sans lourds investissements matériels
  • Développer des modèles plus justes, évolutifs et durables

Avec des solutions comme l’application FAIRTIQ, il est possible de concevoir, tester et ajuster rapidement un modèle de tarification au kilomètre, sans recourir à de grands projets d’infrastructure. Qu’une région privilégie la logique du « vol d’oiseau », un calcul basé sur l’itinéraire ou une approche hybride, FAIRTIQ offre la flexibilité nécessaire pour concevoir un modèle sur mesure.

Vous souhaitez explorer la tarification au kilomètre dans votre région ? 💡

Participez à notre webinaire le 22 ou 23 octobre pour découvrir des retours d’expérience concrets, des témoignages inspirants et les points clés à considérer pour lancer votre propre modèle. Parmi les intervenant·e·s :

📅 Mercredi 22 octobre 2025, 11h00 CEST (en allemand)
« Faire Tarife statt Tarifgrenzen: Distanzbasiertes Pricing im ÖPNV »

Avec :

  • Bianka Bönig, Senior Consultant, Mobilité Consulting (Allemagne)
  • Stefanie Herrmann, Responsable du département gestion tarifaire, KVV (Karlsruhe, Allemagne)
  • VGN (Nuremberg, Allemagne), sur le pilote egon et ses résultats
  • Discussion en panel & session de questions/réponses

 

📅 Jeudi 23 octobre 2025, 14h00 CEST (en anglais)
« Boost Ridership, Cut Complexity: Proven Paths Beyond Zone-Based Systems »

Avec :

  • Bianka Bönig, Senior Consultant, Mobilité Consulting (Allemagne)
  • Jan Kolařík, Consultant et planificateur pour la région de Zlín (République tchèque)
  • Kjersti Nordgård, Directrice des ventes et du marketing, Brakar (Norvège)
  • Discussion en panel & session de questions/réponses